LE NOZZE DI PELEO E DI TETI
Les Nopces de Pélée et
Thétis
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COMPOSITEUR
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Carlo CAPROLI
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LIBRETTISTE
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Francesco Buti et Isaac de
Bensérade
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Le Nozze di Peleo et di Teti, ou Les Nopces
de Pelée et Thétis, comédie italienne en musique
entremêlée d'un ballet sur le même sujet,
commandée par Mazarin, fut représentée neuf fois
dans la salle du Petit Bourbon (*), à partir du 14
avril 1654, dans des décors de Giacomo Torelli
(**).
(*) "Cette salle est de dix-huit toises de longueur, sur
huit de largeur : au bout de laquelle est encore un demi-rond de sept
toises de profondeur, sur huit et demie de large, le tout en
voûte semé de fleurs de lis. Son pourtour est
orné de colonnes avec leurs bases, chapiteaux, architraves,
frises et corniches d'ordre dorique : entre icelles corniches, des
arcades en niches. En l'un des bouts de la salle, s'élevait un
théâtre de six pieds de hauteur, de huit toises de
largeur et d'autant de profondeur. Le dais de leurs majestés,
en face du théâtre, était à l'autre bout
de la galerie." (Richer, Mercure français - 1614)
(**) "Molière voulait faire emporter les
décorations du Petit-Bourbon ; Vigarani, machiniste et peintre
en décors du roi, nouvellement arrivé, les retint sous
le prétexte de les faire servir au théâtre des
Machines qu'il construisait aux Tuileries. Cet envieux les fit bruler
jusqu'à la dernière, afin qu'il ne restât rien de
Torrelli, son prédécesseur, dont il voulait ruiner,
ensevelir les œuvres et la mémoire." (Castil-Blaze -
L'Opéra Italien de 1548 à 1856)
Les costumes avaient dessinés par Henri Gissey,
futur dessinateur du Roi.
La reine Anne d'Autriche, Charles II, roi d'Angleterre
en exil, et toute la cour assistèrent à la
représentation du 14 avril.
Dès le mois de décembre 1653, Mazarin
avait fait venir l'abbé Buti, auteur du livret de
l'Orfeo de Rossi, qui écrivit celui des Nozze,
complété par des vers de Bensérade pour le
ballet final. Le 16 (ou le 26 ?) janvier 1654, une nouvelle troupe de
chanteurs et musiciens, avec Caproli lui-même, dit Carlo del
Violino, arriva d'Italie, ce que relata Loret dans sa Muze
historique :
J’appris hier, en mangeant ma soupe,
Qu ‘une belle et gaillarde troupe
De très rares comédiens,
Et même grands musiciens,
Arriva lundi de Mantoue,
Naples, Turin, Rome et Padoue,
Pour être du ballet royal
Qu'on doit danser au Carnaval.
On dit que ce seront merveilles,
Et que les yeux et les oreilles
Des spectateurs tous ébaudis
Feront illec leur paradis.
Torelli, pour sa part, n'avait pas quitté la
France durant la Fronde, au risque de sa vie (quoique ayant
abrégé et francisé son nom en Torel, il fut
emprisonné au Châtelet).
L'oeuvre se présente comme une comédie
italienne en musique, entrecoupée d'intermèdes
dansés (dix entrées) et complétée d'un
agréable balet sur le mesme sujet. Parmi les artistes
italiens, on comptait le fameux castrat Giuseppe Chiarini, dans le
rôle de Pélée, Vittoria Caproli, épouse
(ou fille ?) du compositeur, Antonio d'Imola, Gerolamo Pignani,
Tomaso Staffordo (Anglais, de son vrai nom Thomas Stafford),
Filiberto Ghigof (Russe ou Polonais). Mazarin avait donné
à cette troupe le titre de Musique du cabinet du Roi, pour la
distinguer de la Musique de la Chambre.
Des interprètes français
participèrent aux ballets, tant professionnels - Beauchamps,
Louis Mollier, Verpré, Lully, Cambefort - que des nobles de la
Cour parmi lesquels Monsieur, frère du roi, son épouse
Henriette d'Angleterre (une des neuf Muses), le duc d'York,
frère de Charles II, la princesse de Conti, mademoiselle de
Mancini, le comte de Saint-Aignan.
Le jeune Louis XIV dansa dans six entrées de
ballet, représentant successivement Apollon, une Furie, une
Dryade, un académiste, élève du centaure Chiron,
un courtisan et la Guerre, avec Jean-Baptiste Lully à ses
côtés, qui tint également les rôles d'un
académiste et d'une Furie brandissant d'une main une torche,
de l'autre une poignée de serpents.
Les représentations s'étalèrent
jusqu'à la fin du mois de mai, certaines ayant lieu sans doute
au Théâtre du Marais, Sa Majesté, par une
bonté particulière, voulant que le peuple puisse avoir
sa part de ce rare divertissement. Castil-Blaze cite une
représentation au Petit-Bourbon le 14 avril.
La Gazette relata brièvement
l'évènement : Le 20 [mai] la Comédie
italienne fut encore présentée devant la Reyne, Leurs
Majestés Britanniques, les ducs d’York et de Gloucester, Son
Eminence et tous les seigneurs de la cour. Et comme cette
pièce est si merveilleuse qu’on ne se peut lasser de la voir
ni s’empêcher d’être surpris de la beauté de ses
machines, où le sieur Torelli, qui en est l’inventeur et des
plus fameux en ce genre de mécaniques, semble s’être
surpassé soi-même, tous les spectateurs avouèrent
qu’elle leur paraissait non seulement aussi nouvelle, mais encore
beaucoup plus belle que dans ses premières
représentations.
En reconnaissance de son succès, Caproli fut
fait maître de musique du cabinet du Roy, mais retourna
à Rome dès 1654.
Francesco Buti, de son côté, obtint de
Mazarin la naturalisation française, puis une pension de deux
mille livres sur l'évêché de Carcassonne.
La description des décors
fut imprimée en italien et en français,
accompagnés de dix gravures d'Israël Silvestre
(1621-1691), d'après François Francart (1622-1672),
sous le titre Décorations et
machines aprestées aux Noces de Tétis, ballet royal ;
représentées en la salle du Petit-Bourbon, par Jacques
Torelli, inventeur (Scene e
Machine preparate alle Nozze di Teti. Balletto Reale representato
nella sala del piccolo Borbone).
La partition de Caproli est perdue, mais les airs de danses du
ballet ont été conservés, et les vers de
Bensérade pour ce même ballet furent publiés,
avec le poème italien de Buti, sous le titre Les Nopces de
Pelée et Thétis, comédie italienne en musique
entremêlée d'un ballet sur le même sujet.
Castil-Blaze, qui attribue
l'oeuvre à Cavalli (*), raconte :
On y voyait Prométhée
enchaîné sur le mont Caucase, et le vautour qui lui
déchirait le cœur en battant des ailes. Chiron le centaure y
galopait. Le rôle de la Discorde, rôle très
important aux noces de Pélée, avait été
supprimé ; voici la raison qu'en donne le livret : — La
Discorde y fût bien venue, mais elle aurait eu honte de
paraître sur le théâtre après avoir
été chassée de la France ; il n'était pas
à propos qu'elle vint troubler cette agréable
fête. » Monsieur, frère de Louis XIV,
représentait l'Amour dans cet opéra, pour lequel on fit
233 costumes. Les dromadaires de la suite de Pélée
obtinrent le plus grand succès.
Georges d'Heilly commet la
même erreur, écrivant dans Foyers et Coulisses
que le maestro Cavalli avait
été appelé en France spécialement pour
qu'il y montât son ouvrage.
Voltaire raconte de son
côté que :"Louis XIV y
dansa. La nation fut charmée de voir son roi, jeune, d'une
taille majestueuse et d'une figure aussi aimable que noble, danser
dans sa capitale, après en avoir été
chassé ; mais l'opéra du cardinal n'ennuya pas moins
Paris pour la seconde fois."
Reprenant le thème
d’une " opera scenica " représentée à Venise en
1639, Les Noces de Pélée et de Thétis, "
comédie italienne en musique entremêlée d’un
ballet sur le même sujet " se révèlent comme un
événement politique important de l’après-Fronde
en France.
Le jeune roi Louis XIV, qui
n’avait pas tout à fait seize ans, y danse sous le costume
d’Apollon, apparaissant comme vainqueur, pacificateur et centre d’une
harmonie politique rétablie, comme il est au centre de la
chorégraphie.
Aussi les contemporains, les
journaux et les diplomates ont-ils beaucoup écrit sur cet
événement, retenant plus que la musique (aujourd’hui
perdue), de Carlo Caproli pour l’opéra, de musiciens anonymes
pour les entrées du ballet), le message politique du livret
d’Isaac de Benserade (1613-1691) et les machines et
décorations du décorateur italien Giacomo Torelli
(1608-1678)
Le livret conservé
à la Bibliothèque nationale de France, imprimé
par R. Ballard en 1654, contient dans une première partie
l'argument et les vers des entrées en français, dans la
seconde partie, le texte de la pièce en italien et en
français en regard.
On a conservé trois
séries de dessins de costumes ou décors pour les
Noces de Pelée et
Thétis.
Ceux du Musée Carnavalet
sont attribués à l'atelier de Henri Gissey. Une
très belle série est conservée à la
bibliothèque de l'Institut.
Plusieurs dessins (Vienne, Rome,
Paris, Archives Nationales) du décor de l’apothéose
finale du troisième acte sont conservés : six
nuées portant dix-huit personnages s’entrouvrent pour laisser
apparaître un palais céleste. Celui de la
Bibliothèque-musée de l'Opéra correspond
à un premier projet, abandonné. Les planches ont
été gravées par Israël Sylvestre,
dessinateur ordinaire du Roi (1621 - 1691), d'après F.
Francart.
La musique est perdue.
Argument
Pelée, roi de Thessalie, amoureux de
Thétis, et traversé de deux puissants rivaux, Neptune
et Jupiter, fait en sorte, par les conseils de Chiron, et par le
secours de Prométhée, que l'un et l'autre sont à
la fin exclus de leur prétention. Neptune s'en désiste
à cause de la vieillesse, et Jupiter, encore plus vieux mais
aussi bien plus considérable, y reenonce lui-même pour
son propre intérêt. Ainsi Thétis, pleinement
persuadée de sa constance et de la fidélité de
son amant, consent à l'épouser et on
célèbre le mariage où se fait un grand concours
de Dieux et de Déesses. Prométhée, qui avait
assez bien servi en cette occasion pour mériter la fin de son
tourment, s'y trouve aussi et amène avec soi les Arts
Libéraux et les Méchaniques qu'il a inventées.
La Discorde y fût bien venue, mais elle aurait eu honte de
paraître sur le théâtre après avoir
été chassée de France, et il n'était pas
à propos qu'elle vint troubler une fête si
agréable. (édition Ballard)
Personnages :
Chanteurs : l'Epidan, L'Onochone, tous deux
Fleuves de Thessalie, Jupiter, Neptune, Junon, Mercure, Pelée,
roi de Thessalie, Thétis, Chiron, Prométhée,
Choeur de Néréïdes, Choeur de Sirènes et de
Tritons, Choeur de Sacrificateurs de Mars, Choeur de toutes les
déïtés.
Danseurs : Apollon et les Neuf Muses, Magiciens,
Pêcheurs de corail, Furies de la Jalousie, Hommes et femmes
sauvages, Dryades, Chevaliers de Thessalie, Académistes de
Chiron, Courtisans de Pelée, Petites filles de la cour de
Thétis, Arts libéraux et serviles, Amours, Junon,
Pronube, Hyménée, Hercule, Harmonie céleste
Synopsis
Prologue
Apollon et les Muses sur le mont
Piéreide, butte haute de vingt-deux pieds, et percée
à jour comme un arc de triomphe. Ce monticule isolé
formait le centre de la scène ; des files d’arbres à
gauche et à droite complétaient le paysage. Au premier
plan à gauche et à droite sont étendus les deux
fleuves Epidan et Onochone, représentés par deux
chanteurs. Devant chacun est agenouillé un choeur de
Néréides. Ces choeurs invitaient Apollon à
descendre en terre et à prendre part aux noces de
Pélée. Ces choeurs achevés, la montagne
s’abaissait peu à peu, et déposait sur le
théâtre Apollon et les Muses.
Première
entrée
Le Roi (Apollon), la princesse
d’Angleterre (1), la charmante Henriette, chassée par la
Révolution, et qui devait épouser Monsieur (Erato),
Mlle de Villeroy (Clio), la duchesse de Créquy
(2) (Euterpe), la duchesse de Roquelaure
(3) (Euterpe), la princesse de Conti (4) (Uranie), Mme
de Monlouët (Terpsichore), la duchesse de
Saint-Simon (5) (Calliope), Mme d'Olonne (6)
(Melpomène), Mlle de Gourdon (7)
(Polymnie)
(1) Henriette-Anne
d'Angleterre, fille de Henriette de France de France, fille cadette
d'Henri IV, et de Charles Ier d'Angleterre, était
réfugiée en France, avec sa mère, depuis 1644.
Elle avait alors dix ans.
(2) Armande de Lusignan,
épouse de Charles III de Blanchefort-Créquy, dit le duc
de Créqui, chevalier des ordres du roi, premier gentilhomme de
sa chambre, gouverneur de Paris et lieutenant-général
des armées du roi.
(3) Charlotte-Marie de
Daillon Du Lude, soeur du comte Du Lude, épouse du duc de
Roquelaure réputé pour ses bouffonneries, elle mourut
à vingt-sept ans en 1657. Elle était
réputée être une des plus belles personnes de la
Cour, et nourrissait une passion pour le marquis de
Vardes.
(4) Anne Marie Martinozzi
(1639-1672), nièce du cardinal Mazarin, épouse d'Armand
de Bourbon, prince de Conti. Le mariage venait d'avoir lieu, le 21
février précédent.
(5) épouse de Claude
de Rouvroy de Saint-Simon, favori de Louis XIII.
(6) Catherine-Henriette
d’Angennes, comtesse d’Olonne, fille de Charles d’Angennes, seigneur
de la Loupe, mariée à Louis de la Trémouille,
comte d’Olonne, en 1652.
(7) fille d'honneur de la
Reine
Acte I
Scène 1 - Une grotte
ouverte des deux côtés, c’est-à-dire une sorte
d’immense tunnel de rochers cintrés. Les premiers
étaient formés par des châssis, raccordés
avec une toile de fond dont la partie inférieure
représentait la suite de cette perspective, tandis que le haut
figurait un trou dans le plafond de la grotte et laissait voir un
paysage. Les rochers affreux qui
seuls en forment la grandeur, ne donnent pas moins de plaisir que
d’horreur à la vue.
Chiron conseille à
Pelée, qui a pour rivaux Jupiter et Neptune, d’aller sur le
Caucase demander le secours de Prométhée qui, avec le
feu du Ciel qu'il avait dérobé, en avait aussi
emporté toutes les grandes et les sublimes connaissances.
Pelée approuve le conseil.
Deuxième
entrée
Aussitôt un choeur de dix
magiciens qui se trouvait là (comte du Lude (8), marquis de
Villequier (9) et de Genlis (10), MM. Bontemps
(11) et Cabou (12), les sieurs
Verbec, Baptiste (13), et
Lambert) font un charme en dansant
et enlèvent Pelée dans un char volant.
(8) Henri de Daillon, d'abord comte, puis
duc du Lude et pair de France, réputé pour ses
galanteries, et son adoration pour Mme de Sévigné.
Capitaine et Gouverneur de Saint-Germain, Premier Gentilhomme de la
Chambre, il fut en 1669 Grand Maître de l'Artillerie de France.
Il mourut en 1675.
(9) Louis-Marie d'Aumont (1631-1704),
marquis de Villequier, marié à une fille de Michel Le
Tellier, père de Louvois . Premier Gentilhomme de la Chambre
du Roi .
(10) Florimond Bruslart, marquis de Genlis,
gouverneur du fort Barant, capitaine-lieutenant des gendarmes du duc
d'Anjou, un des courtisans qui reparaissent le plus souvent dans les
ballets du roi, un de ceux contre lesquels Benserade a lancé
le plus d'épigrammes, toujours les mêmes et toujours
variées. Ces épigrammes ont invariablement rapport
à la laideur extraordinaire du marquis.
(11) Alexandre Bontemps (1626 - 1701), il
devint Premier valet de chambre du roi de 1659 à 1701,
à la mort de son père Jean-Baptiste
Bontemps.
(12) Maître Cabou, avocat au Conseil,
dont la présence est attestée dans seize ballets.
Tallemant des Reaux disait de
lui qu'il était une espèce de coquin
(c'est-à-dire un homme de basse naissance), qui joue, qui
danse et qui boit...
(13) Jean-Baptiste Lully
Scène 2 - Les cintres de
roches n’ont pas changé, mais la toile de fond
représente maintenant une perspective où l'on voit la
mer.
Thétis paraît sur
une grande coquille conduite par un demi-dieu marin (le comte de Saint-Aignan (14)), environnée
d'une troupe de douze pêcheurs de corail (Monsieur (15), frère
du Roy, le duc d'York (16), le comte de
Guiche (17), le comte de Saint-Aignan fils, dit le petit, le
marquis de Mirepoix (18), Saintot
(19), de la Chesnaye, Bruneau, S. Fré, Langlois,
Raynal). Neptune arrive
également sur une coquille tirée par des Chevaux
marins. Neptune déclare sa passion à la déesse
et s’en voit méprisé ; il se retire avec colère,
et déchaîne alors un tel orage que Thétis et sa
suite doivent descendre à terre.
(14) François Honorat
de Beauvilliers (1610 - 1687), duc de Saint-Aignan. Il fut duc et
pair de France, premier gentilhomme de la chambre, conseiller du roi,
gouverneur de plusieurs provinces.
(15) Philippe
d'Orléans (1640 - 1701), frère cadet de Louis XIV. Il
avait alors treize ans.
(16)
Jacques Stuart (1633 - 1701), cousin de Louis XIV, duc d'York en
1644. Il succéda à son frère Charles II sur le
trône d'Angleterre, en 1685, sous le nom de Jacques II.
(17) Armand de Gramont, comte de Guiche (1638 - 1674),
connu pour sa beauté, son grand air, son amabilité, sa
passion pour Madame Henriette, passion qui le fit exiler de la cour,
et pour le rôle qu'il joua lors du passage du Rhin.
(18) Jean-Baptiste de Lévis et de
Lomagne, marquis de Mirepoix.
(19) Nicolas de Saintot, maître des
cérémonies et introducteur des ambassadeurs. Il
était le fils de Mme de Saintot, sœur du poêle Vion
d'Alibray, célèbre par son amour pour
Voiture.
Troisième
entrée
Les pêcheurs de corail,
échappés de la trempette, font entre-eux une danse pour
tâcher de divertir, Thétis.
Scène 3 - L’autre rival de
Pélée, Jupiter, environné de pompe et de
majesté, descend au milieu d'une grande nue. On voit ce dieu
se promener tantôt d’un côté, tantôt de
l’autre et comme il vient en qualité d’amant pour caresser
Thétis, il en est méprisé ; ce mépris le
met en tel excès de colère qu’il commande aux vents de
l’enlever. On voit donc descendre du grand nuage où est
Jupiter « un plus petit qui s’avance en droite ligne vers le
théâtre, descend, environne la déesse et
l’emporte au milieu de l’air ; cependant, Junon, jalouse,
paraît sur son char et querellant son mari, elle est cause
qu’il s’envole vers le ciel sur son aigle, et qu’il fait fermer son
grand nuage ; Junon ayant appelé les furies de l’enfer, une
tête d’un horrible monstre sort de la terre, qui, poussant des
flammes et des fumées mêlées avec le soufre,
vomit quatre furies.
Quatrième
entrée
Les Furies, accompagnées
de plusieurs autres (Le Roy, le duc
de Joyeuse (20), le marquis de Genlis, Bontemps, de Lorge,
Verpré, Beauchamp (21), Mollier
(22), le Vacher, Des-airs, Dolivet,
Baptiste), font une danse aussi
extravagante que curieuse.

(20) Louis de Lorraine, duc de Joyeuse, pair et grand
chambellan de France (1622 - 1654), mort des suites d'une blessure
qu'il avait reçue en chargeant un parti d'ennemis près
d'Arras.
(21) Pierre Beauchamp (1631
- 1705), issu d'une famille de danseurs, débuta à la
Cour en 1648 dans le Ballet des Dérèglements des
Passions. Il collabora avec Jean-Baptiste Lully et Molière, et
forma de nombreux danseurs.
(22) Louis de
Mollier
Acte II
Scène 1 - La cime du
Caucase. Pelée, conduit par des hommes et des femmes sauvages,
rencontre Prométhée, avec l'Aigle qui lui ronge le
coeur. Prométhée l'assure que l'Oracle de Delphes
aurait prédit que naîtrait de Thétis un fils plus
grand que son père. Pelée s'en retourne en Thessalie
rassuré.
Cinquième
entrée
Les Sauvages (de la Chesnaye, de Joyeux, la Marre, Monglas, Laleu,
Raynal, Roddier), sur l'apparence
que Prométhée sera délivré de sa peine,
expriment leur allégresse par une danse.
Scène 2 - Un palais d’or
et de pierreries.
Jupiter se trouve dans le palais
qu'il a préparé en secret pour ses noces avec
Thétis. Mercure vient l'avertir de l'oracle. Jupiter inquiet,
fait céder l'amour à l'ambition et se retire dans le
ciel.
Sixième
entrée
Les Driades, ces Nymphes qui
vivent sous l'écorce des arbres, (Le Roy, le duc de Joyeuse, le duc de Roquelaure
(23), le marquis de Genlis, Bontemps, de Lorges,
Des-airs, le Vacher, Verpré, Beauchamp, Mollier,
Dolivet), jalouses de Thétis,
et qui espionnaient Jupiter au profit de Junon, témoignent par
une danse de leur joie.
(23) Le marquis, puis duc à brevet, Gaston de
Roquelaure, maitre de la garde-robe, réputé pour ses
indiscrétions, ses bonnes fortunes, ses étourderies et
ses gasconnades.
Scène 3 - Une perspective
sur une statue du Dieu Mars. Les Chevaliers de Thessalie,
affligés de la cruauté de Thétis envers leur roi
Pelée, entreprennent un Combat à la Barrière en
l'honneur de Mars. D'un autre côté, on fait un sacrifice
en l'honneur de Mars pour qu'il intervienne auprès de
Vénus pour attendrir le coeur de Thétis et que leur roi
revienne. La statue de Mars prédit toute sorte de
bonheur.
Septième
entrée
Les Chevaliers (Le comte de Saint-Aignan, chef des tenants, le jeune
Beaufort, S. Maury, De Sens, Deruille, tenants ; Beaufort, chef des
assaillants, Gamars, Clinchant, Ourdault, De Hallus, assaillants)
quittent leur combat et dansent.
Acte III
Scène 1 - Le portique du
palais de Thétis. Pelée, revenu du Caucase, et ayant
rencontré Chiron, se présente à Thétis,
et en vient auprès d'elle à la dernière violence
des prières amoureuses.
Huitième
entrée
Les Académistes de Chiron
(Le Roy, Bontemps, Cabou, Mollier,
Bruneau, Langlois, Beauchamp, Le Vacher, Baptiste, Dolivet, de
Lorges), sous la direction de leur
maître (Hesselin
(24)), et
habillés en Indiens, font une danse pour montrer leur joie
qu'ils ont du retour de Pelée.
(24) Louis Hesselin (1602 - 1662).
Maître de la chambre aux deniers el surintendant des plaisirs
du roi, fameux par ses richesses et sa magnificence. Le «
splendide sieur » Hesselin mourut d'indigestion en août
1662.
Scène 2 - Pelée
tente à nouveau de gagner les bonnes grâces de
Thétis, en vain. Il ne se rebute pas et lui témoigne
toujours autant de hardiesse que d'amour. Thétis se change en
rocher, mais Pelée l'embrasse et proteste de mourir
plutôt que de le quitter. Thétis se rend et l'accepte
pour mari.
Neuvième
entrée
Toute la Cour de Pelée est
dans une allégresse non pareille, et les courtisans
(le Roy, le duc de Candale
(25), le marquis de Villequier, le marquis de Genlis, le
Comte) se mettent à danser.
(25) Louis-Charles-Gaston de
Nogaret, de la Valette et de Foix, duc de Candale (1627 - 1658),
connu par sa bravoure et ses exploits militaires, plus connu encore
par son esprit, sa beauté, sa grâce et sa
galanterie.
Scène dernière -
Thétis et Pelée apparaissent sur un haut trône,
dont le dessus se change en une perspective du firmament, où
sont les Amours. Toutes les Déïtés accourues aux
noces apparaissent à travers une nue. Hercule (le duc Damville (26)) y amène
Prométhée délivré sur ordre de Jupiter.
Junon (Mme de Commenge)
et Hyménée
(le duc de Joyeuse), accompagnées des Intelligences qui composent
l'Harmonie
céleste, descendent dans une grande machine, et se joignent
aux Arts libéraux (Mme de Brancas, représentant la
Géométrie, Mlle de Mancini, représentant la
Musique, Mlle de Mortemart, représentant la Dialectique, Mlle
de la Rivière-Bonneuil, représentant la Grammaire, Mlle
du Fouilloux, représentant la Rhétorique, Mlle
d'Estrée, représentant l'Astrologie, Mlle de la Loupe,
représentant l'Arithmétique) et Méchaniques (le Roy, représentant la Guerre, le comte de
Saint-Aignan, représentant l'Agriculture, De Verpré,
représentant la Navigation, De Lorges, représentant la
Chasse, Le Vacher, représentant l'Orfèvrerie,
Beauchamp, représentant la Peinture, Dolivet,
représentant la Chirurgie).

(26) François Christophe de
Lévis Ventadour, mort en 1661 à cinquante-huit ans,
d'abord comte de Brion, puis créé duc de Damville (ou
d'Amville, ou d'Anville), en 1631, à la mort de Henri II de
Montmorency, son oncle maternel, gouverneur du Limousin, capitaine de
Fontainebleau, vice-roi de l'Amérique en 1655.
Dernière
entrée
Il se fait un grand ballet
à Terre, tandis que les Amours (Monsieur, frère unique du Roy, le Comte de
Guiche, le marquis de Villeroy, le petit comte de Saint-Aignan, le
petit Rassent, page de la Chambre, Laleu, Bonart, Aubry)
en font un autre au plus haut du
Ciel.
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