Dernier
opéra (HWV 38) écrit par Haendel pour le
Théâtre du Covent Garden, terminé 27 janvier
1737, créé le 18 mai 1737, en présence de la
famille royale, représenté à quatre
reprises.
Haendel venait de subir une
attaque qui l'avait paralysé de tout le côté
droit.
La distribution réunissait
Anna Maria Strada del Pò, soprano (Berenice), Gioacchino Conti
dit Il Giziello, soprano castrato (Alessandro), Domenico Annibali,
alto castrato (Demetrio), Francesca Bertolli, alto (Selene), Maria
Caterina Negri, alto (Arsace), John Beard, ténor (Fabio),
Henry Theodore Reinhold, basse (Aristobolo).
Reprise à Brunswick en
1743.
Personnages : Berenice, reine d'Egypte (soprano), Selene, soeur
de Bérénice, amante de Demetrio (alto), Alessandro,
prince romain (soprano), Demetrio, macédonien, amant de selene
(alto), Arsace, Egyptien (alto), Fabio, envoyé de Rome
(ténor), Aristobolo, conseiller à la cour
(basse)
Synopsis
En Égypte, vers l'an 81
av. J-C
Acte I
Bérénice aime
Demetrio, qui s'est allié à l'ennemi de l'Egypte, le
roi Mithridate ; mais elle est prête à laisser la
politique gouverner son coeur : pour conclure une alliance avec Rome,
elle épousera un Romain. Fabio, l'envoyé romain, lui
présente l'homme que Rome lui a choisi pour époux,
Alessandro. Ce dernier tombe amoureux de Bérénice
dès qu'il la voit. Mais voilà qu'elle refuse que l'on
choisisse pour elle. Fabio rappelle à Alessandro que si
Bérénice le refuse, il devra épouser sa soeur
Sélène. Il suggère à Alessandro de suivre
l'exemple de l'abeille, qui ne s'arrête jamais longtemps sur
une fleur.
Dans les appartements royaux
de la princesse Sélène
Demetrio et Sélène
s'aiment en secret. Sélène sait que sa soeur, la reine,
serait furieuse si elle l'apprenait et le supplie de partir. Mais il
lui confie que son ami Mithridate pourrait l'aider à
détrôner sa soeur. Il part et Sélène
apprend de la bouche d'Aristobolo que Rome insiste maintenant pour
que Bérénice épouse Alessandro ; Demetrio doit
être exécuté. La nouvelle bouleverse
Sélène. Bérénice vient informer sa soeur
qu'elle doit épouser "un prince de sang royal". Lorsqu'elle
comprend qu'il s'agit d'Arsace, Sélène est
amèrement déçue. Bérénice prend la
rougeur qui monte aux joues de Sélène pour une preuve
d'amour. Arsace s'imagine que l'amour qu'il porte à
Sélène a maintenant quelque chance de
succes.
Une salle du
palais
Alessandro a sauvé la vie
de Demetrio, et Bérénice le regarde maintenant d'un
nouvel oeil. Mais il repousse sa gratitude : il ne recherche que le
mérite de l'honneur. Bérénice promet à
Demetrio qu'elle prendra son parti : ses ennemis à lui seront
ses ennemis à elle (duo Se il
mio amor).
Acte II
Dans les appartements de la
reine
Sans sa chère
Sélène, Demetrio dépérit. Il a perdu le
goût du pouvoir et est horrifié lorsqu'il entend Fabio
annoncer que Rome désire maintenant qu'Alessandro
épouse Sélène. Bérénice rejette la
requête en affirmant que Sélène est
déjà promise à Arsace. Fabio lui présente
une alternative simple, la guerre ou la paix. Demetrio reste
impassible à l'idée d'une guerre, ce qui plaît
à Bérénice, car elle aime le voir en
colère. Resté seul, Demetrio s'imagine que
Sélène l'a trahi en acceptant d'épouser Arsace.
Pour se venger, il conspirera avec Mithridate, et même avec les
Furies des Enfers, contre l'Egypte (Su, Megera, Risifone, Aletto !)
Alessandro rêve d'adorer sa
déesse Bérénice. Il entend Aristobolo ordonner
à Arsace de laisser Sélène à Alessandro
afin de préserver la paix avec Rome. Alessandro refuse de se
marier sans amour et est donc heureux de céder
Sélène à Arsace. Mais Aristobolo persuade Arsace
de renoncer à Sélène. Arsace évalue les
risques conflictuels de l'amour et de la gloire, et accepte avec
perplexité. Comme le souligne Aristobobo, sans la politique le
monde serait beaucoup plus honnête.
Dans les appartements de
Sélène
La jalousie pousse Demetrio
à accuser Sélène d'infidélité ; il
menace de tuer son rival Arsace et admet avoir feint d'aimer
Bérénice. Bérénice entend cette
révélation et explose de fureur contre la trahison de
Demetrio. D'une manière vindicative, la reine force
Sélène à accorder sa main à Arsace.
Toutefois, Arsace insiste pour sacrifier son propre bonheur à
l'Egypte et offre donc Sélène à Alessandro, qui
la refuse à son tour, car elle ne l'aime pas. Furieuse,
Bérénice envoie Demetrio à la tour. Il se
déclare enfin : il aimera toujours Sélène,
même en prison (Si, tra i
ceppi). Sélène rejette
Arsace parce qu'il s'est montré indigne d'elle.
Acte III
Bérénice entend
Demetrio confirmer qu'il est prêt à mourir pour
Sèlène. Rome perd patience envers l'Égypte.
Bèrénice confie à Fabio son anneau royal :
à lui de décider qui elle épousera ; l'homme
qu'il aura choisi lui rapportera l'anneau. Seule, elle constate que
cette divinité aveugle qu'est l'amour a des caprices
incompréhensibles (Chi
t'intende).
Le jardin royal
Arsace fait à nouveau la
cour à Sélène, qui promet de l'épouser
s'il libère Demetrio. Alessandro apporte à Arsace
l'anneau royal : comme il provient de Fabio et non de
Bérénice elle-même, Alessandro refuse
naturellement d'en tirer avantage. Arsace l'accepte et promet de
faire connaître à la reine les sentiments d'Alessandro.
Lorsque Fabio revient pour mener Alessandro à son mariage, il
est horrifié de découvrir que le Romain insiste encore
pour laisser Bérénice choisir elle-même son mari.
Alessandro explique que Cupidon a remis son sort entre les mains de
la reine.
Bérénice
décide de punir Demetrio pour sa double trahison et ordonne
à Aristobolo de lui apporter la tête de Demetrio au
temple. Elle s'ordonne à elle-même de ne pas pleurer
(Avvertite, mie
pupille).
Bérénice confie
Demetrio à la déesse Isis et à ses ministres.
Sélène la supplie de le laisser en vie, puis demande de
se joindre à Demetrio dans la mort. Arsace intervient, offre
sa propre vie et rend son anneau à Bérénice.
Alessandro explique qu'il l'a donné à Arsace, car il
souhaitait être choisi pour mari par Bérénice et
non par Rome. Emue par le beau geste d'Alessandro, elle
découvre qu'elle l'aime. Dans un duo, ils
célèbrent leur amour mutuel. Bérénice
laisse à Alessandro le soin de décider du sort de
Demetrio et il lui sauve la vie. Arsace autorise ensuite Demetrio
à épouser Sélène et tous celèbrent
la fin des querelles entre l'amour et la politique. (Kobbé - Robert Laffont)
Vienne - Theater an der
Wien - 27 janvier 2011 - version de concert - Il
Complesso Barocco - dir. Alan Curtis - avec Klara Ek (Berenice),
Ingela Bohlin (Alessandro), Franco Fagioli (Demetrio), Romina
Basso (Selene), Mary-Ellen Nesi (Arsace), Anicio Zorzi Giustiniani
(Fabio), Matteo Ferrara (Aristobolo)
Théâtre
des Champs Élysées - 21 novembre 2009 -
en version de concert - Il Complesso Barocco - dir. Alan Curtis -
avec Klara Ek (Berenice), Ingela Bohlin (Alessandro), Toby Spence
(Fabio), Franco Fagioli (Demetrio), Romina Basso (Selene), Mary
Ellen Nesi (Arsace), Vito Priante (Aristobolo)
Karlsruhe - 23 octobre 2001, 27 février,
1er, 4 mars 2002 - Kleines Haus - Deutsche
Händel-Solisten - dir. Andreas Spering - mise en scène
Ulrich Peters - décors Martin Warth - costumes Götz
Lanzelot Fischer - avec Susanne Cornelius (Berenice), Rosemara
Ribeiro (Selene), Marianne Kienbaum (Alessandro), David Cordier
(Demetrio), Martin Wölfel (Arsace), Guido Jentjens
(Aristobulo), John Pickering (Fabio)
Düsseldorf
- avril 2001
Karlsruhe - Kleines
Haus - 24 février 2001 et
sq. - Deutsche Händel Solisten- dir. Andreas
Spering - mise en scène Ulrich Peters - décors
martin Warth - costumes Götz Lanzelot Fischer - dramaturgie
Frank Gersthofer - Première recréation - avec
Kornelia Eng (Berenice), Rosemara Ribeiro (Selene), Johanna
Stojkovic (Alessandro), David Cordier (Demetrio), Martin
Wölfel (Arsace), Alexander Pfitzenmeier (Fabio), Guido
Jentjens (Aristobolo). Airs en italien, récitatifs en
allemand.
"Berenice a été
le dernier opéra écrit par Haendel pour le
theâtre de Covent Garden, la même année qu'Arminio
et Giustino, au cours d'une période de crise marquée
par la désaffection de plus en grande du public londonien pour
l'opéra italien. Créée le 18 mai 1737, Berenice
ne devait connaître en tout que quatre représentations,
devant des salles de plus en plus clairsemées. Hormis une
reprise allemande en 1743, à Brunswick, on n'en retrouve plus
aucune trace ensuite, jusqu'à cette nouvelle production du
Festival de Karlsruhe. En dépit de la rareté de
l'oeuvre, il est difficile de considérer son retour à
l'affiche comme un événement majeur. Haendel y
déploie tout son savoir-faire de vieux routier de l'opera
seria, mais ne parvient pas à transcender un livret à
la fois fort complexe et incurablement statique pris au piège
de conflits politiques et amoureux insolubles, les personnages y
enchaînent des airs de belle facture, mais d'une
caractérisation qui évolue fort peu. La soirée
semble s'enliser au fut et à mesure que se cristallise une
situation sans issue, qui ne se débloque qu'au tout dernier
moment, au cours d'un finale complètement artificiel. Les
meilleurs moments se trouvent dans la première partie ensuite,
la belle mécanique haendelienne semble tourner en rond, et ce
d'autant plus que l'orchestre, exceptionnellement avare en couleurs
instrumentales (avec simplement les cordes et deux hautbois)
n'apporte ici que fort peu de variété.
En dépit de ces
relatives faiblesses, Ulrich Peters est parvenu à proposer un
spectacle qui soutient presque toujours l'intérêt,
grâce à une direction d'acteurs très vivante et
une bonne dose d'humour. Le jeu sait s'écarter quand il le
faut d'une adhésion trop fidèle au texte chanté,
en créant çà et là de savoureuses
distorsions, et l'on retrouve le même esprit parodique dans le
dispositif scénique très étudié de Martin
Warth, ainsi que dans les costumes très imaginatifs
dessinés par Gotz Lanzelot Fischer. L'impossible semble avoir
été fait pour tirer un spectacle viable d'un ouvrage
mal ficelé - et, dans l'ensemble, c'est assez réussi.
Du côté des solistes, le bilan est, là encore,
très positif. La Berenice de Kornelia Eng fait valoir une voix
lumineuse et flexible, homogène sur toute la tessiture ; David
Cordier est un Demetrio de belle prestance, en dépit d'un
timbre parfois fluctuant, Martin Wôlfel tire le maximum
d'Arsace et Johanna Stojkovic affronte les difficultés des
airs d'Alessandro avec beaucoup de dignité. Haendel
écrit ici pour quelques-uns des meilleurs chanteurs de son
temps, et le grand mérite de cette distribution est de le
faire oublier, sauf lors des apparitions de Rosemara Ribeiro, qui
n'est vraiment pas en mesure de rendre justice au rôle
es-sentiel de Selene. Les Deutsche Händel Solisten ne sont pas
le meilleur orchestre baroque du moment, ce que l'écriture
dépouillée Haendel de certains passages
élégiaques souligne parfois assez cruellement, mais
Andreas Spering semble en tirer le maximum d'expressivité
possible. En revanche, son idée de faire chanter les airs en
italien, en alternance avec des récitatifs traduits en
allemand, n'est guère défendable." (Opéra
International - avril 2001)
Cambridge Handel Opera
Group - 1993
Keele
University - avril 1985 - dir.
George Pratt - première recréation